Dam et son goûter

Depuis maintenant quelques semaines, Mry milite pour que Pour que le goûter retrouve ses lettres de noblesse en adultie, via d’abord un groupe facebook, et maintenant via un blog dédié.

Il a demandé à 52 blogueurs de raconter leurs souvenirs de Goûter. Oui, parce qu’un goûter, c’est la Madeleine de Proust de chacun de nous ! Et pourquoi serait-il honteux et désuet de prendre un BN trempé dans du lait passé la trentaine ?

J’ai envoyé ce texte, que vous pouvez découvrir dans son contexte, ou bien en le lisant juste là, en-dessous. Et vous, vos souvenirs de goûter ?

Eternel gourmand, enfant j’attendais le goûter comme un moment particulier, une sorte de parenthèse douce et sucrée dans une vie dont je ne percevais pas encore le flot et le flux. Insouciance de l’enfance portée par ma douceur préférée : du pain et du chocolat.

Mais attention, pas n’importe quel pain ni chocolat, et encore mois un vulgaire quignon ! Non, un morceau de baguette généreux, pas trop grillé, bien gonflé, coupé juste de la longueur de la barre de quatre carreaux. Et le chocolat ? Une barre de taille réglementaire Suchard au noisettes, le seul qui trouvait grâce à mes yeux.

Le rituel était toujours le même : je creusais avec mon index dans le morceau de pain pour en extraire la mie, moelleuse et dense à la fois (je détestais quand le pain avait trop gonflé et laissait place à de béants trous d’air). Je laissais fondre cet artefact blanc sur ma langue tout en glissant le chocolat dans la gangue de pain, doucement afin de ne pas trop vite afin de ne pas le casser en deux. Puis j’attaquais consciencieusement l’ensemble par le haut, sur le dessus, en grignotant la croûte afin de découvrir sur toute la longueur le chocolat et ses noisettes, lovés dans le fourreau de mie restante.

Je continuais ensuite en croquant à droite un angle de pain et de chocolat, en prenant soin de ne pas émietter le cacao ou de ne pas perdre une noisette en route. Puis à gauche, et enfin au milieu. Enfin, je mangeais le croupion restant à droite, pour finir de tout engloutir.

Ma mère me donnait cette précieuse combinaison, simple et de bon aloi, et pourtant tellement délicieuse à déguster, surtout quand la baguette venait de la boulangerie, encore chaude, laissant doucement ramollir le chocolat dans son sarcophage de pain, rendant les noisettes encore plus craquantes.

Aujourd’hui encore, il m’arrive de me couper un morceau de pain, d’en manger la mie et d’y glisser une barre de chocolat (avec le temps je suis devenu moins regardant sur la marque, mais pas sur le goût ni la qualité, même si le Suchard mauve me sied toujours bien), voire même de donner quelques secondes de micro-ondes pour ramollir le chocolat et réchauffer le pain. Et de me sentir, l’espace d’un instant, basculer dans la cuisine de mes parents, accoudé à la table en formica…