Deux écoles de pensée face au piratage [PIRATAGE]

Je m’explique.

D’un coté, vous avez un professeur associé à l’Ecole Supérieure des Géomètres et Topographes Serge Soudoplatoff.  Le professeur Soudoplatoff, dans une lettre ouverte à Nathalie Kosciusko-Morizet, explique (dans une utopie libertaire … non il faut l’avouer) que l’economie du net ne pourra pas etre fermée:

Madame le Ministre,

si c’est ainsi que vous commencez votre travail, je suis très inquiet. Cette phrase montre deux faits: premièrement, vous ne semblez pas comprendre ce qu’est la nouvelle économie portée par Internet, alors que vous êtes en charge de la prospective; et deuxièmement, vous ne semblez pas voir où sont les vrais problèmes du numérique.

l’économie de l’immatériel est une économie d’abondance, alors que l’économie matérielle est une économie de rareté. Lorsqu’on partage un bien matériel, il se divise. Lorsqu’on partage un bien immatériel, il se multiplie.

Internet porte les valeurs de l’économie de l’abondance. Or, tout le jeu actuel de l’industrie du contenu (musique comme film) est de nier ce fait, et de retourner le plus possible à une économie de rareté, par exemple avec les DRM (stupidité qui est actuellement en train d’être abandonnée…) ou bien en infligeant de lourdes amendes à des “pirates” qui ont mis à disposition du contenu.

Madame le Ministre, avez-vous lu l’excellente analyse de Roberto di Cosmo en 2006, qui montrait que le modèle économique nouveau de l’Internet apportait plus d’argent au créateur que le modèle ancien ? Avez-vous regardé des sites comme Sellaband, qui sont des modèles en peer to peer où des passionnés investissent dans des créateurs  pour leur permettre de lancer un CD ? Avez-vous lu cet article paru en 2002 dans le New York Times, écrit par Kevin Kelly, un des deux fondateurs de Wired magazine, qui montrait déjà le déplacement de la valeur dans l’industrie de la musique ?

Le monde évolue et devient un lieu d’échange en pair à pair. Aux modèles économiques verticaux classiques de l’industrie, Internet supporte la transformation vers un modèle horizontal, de place de marché. C’est là que se situe le rôle principal de l’État: faire en sorte que cette place de marché soit porteuse de nombreuses interactions. L’État se doit de fluidifier les échanges, votre administration se doit d’y contribuer, en apportant aux entreprises et aux citoyens la meilleure infrastructure au meilleur coût. Les services y viendront par eux-même.

Madame le Ministre, laissons-donc les vieux modèles économiques mourir de leur belle mort, et construisons tous le futur, un futur qui sera supporté par un réseau à très haut débit symétrique.

Personnellement, je ne suis pas d’accord sur l’entièreté de la lettre. Il convient de respecter le droit d’auteur. De rétribuer, ceux qui créent. MAIS dans ce nouveau modèle, il ne convient pas de « se faire tondre » par des intermédiaires qui vivent sur un catalogue sans faire leur métier de dénicheur et de promoteur de talent.

En tout cas, au vu de l’action de ce gouvernement (était-ce si différent avant ?), on constate que l’état protège clairement les intérêts d’une petite portion des français (les plus riches je crois ?) dans le plus parfait mépris des droits de tous les autres (« le défaut de protection de la ligne » et l’ouverture « d’un filtrage généralisé » du web est en ce sens édifiant).

Et puis le gouvernent est là pour nous pondre de beau projet:

Nous publions le pré appel d’offres qui va permettre à la riposte graduée de fonctionner en France. On notera la délicatesse de la démarche puisque le projet Création et Internet n’a toujours pas été voté. Ce document est de premier ordre car il permet de toucher d’un peu plus près ce que sera exactement le mécanisme de la riposte graduée. A ce titre, le schéma reproduit est tout à fait symptomatique de la lourdeur du mécanisme.

Le document qui a été officialisé dans les bulletins d’annonces ce 5 mars vise « la réalisation, l’hébergement et la maintenance d’un prototype du système d’information gérant le mécanisme de riposte graduée confié à la Commission de Protection des Droits de la hadopi ». Ce n’est pas encore la « vraie » riposte, mais la réalisation d’un premier prototype avec un appel d’offres préliminaire.

Les premiers mails partiront en juillet

Merci à PC inpact (Loi antipiratage : l’appel d’offres préliminaire d’une usine à gaz) pour avoir déniché cette perle (au fait on ne dit pas  « pour pallier aux attaques externes »). En plus, il y a un beau schéma.

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En tout cas, tout ce débat est bien nauséabond.