Windows 8 ne sera pas la rupture attendue

Cette semaine est sortie une très instructive vidéo de Microsoft montrant les « coulisses » du développement de Windows 8 attendu d’ici à 2 ans environ :

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Intéressante car Microsoft se targue d’une rupture complète de son interface avec le Windows actuel (lui-même hérité de Windows 95 il y 17 ans !) pour glisser vers une interface « en tuiles » identique à celle de Windows Mobile 7 et du Zune.

Je trouve cette mise en forme vraiment différente de celles de iOS et Android (sans compter WebOS et QNX) avec leurs grosses icônes permettant d’accéder à une application. Ici on a un mélange  de fenêtres actives sous forme de widgets, d’accès à des infos sociales ou personnelles… Bref je ne pense que du bien de tout cela. Et Windows 8 serait superbe sur une tablette.

Le poids de « l’héritage » Windows

La question est : comment faire migrer les utilisateurs de Windows XP/Vista/7 vers cette version radicalement différente ? Apple a actuellement exactement le même problème et a choisi de faire subtilement converger iOS et OS X par petites touches (mode fenêtré identique, gestion du touch, démarrage instantané, sauvegarde automatique…). Mais surtout, Apple a osé plusieurs fois remettre à zéro certains principes qu’il avait lui-même mis en place, pour faire drastiquement évoluer les intéractions.

Dans le cas de Windows, c’est différent car Microsoft est paradoxalement prisonnier de son hégémonie : comment faire une rupture sans larguer une part des 90% de sa part de marché, et donc mettre en danger sa vache à lait ? C’est le paradoxe du leader. Car, outre les utilisateurs, c’est surtout l’écosystème et les éditeurs de logiciels qui risquent de ne plus y retrouver leurs petits, sans oublier les entreprises utilisatrices de ces outils.

Il faut donc tout repenser… sans tout mettre à terre. Une solution serait de faire comme a fait Apple : paralléliser les systèmes d’exploitation, les laisser se développer et murir chacun de leur côté (l’un sur iPhone et iPad, l’autre sur Mac), puis faire converger le tout.

Microsoft a tout a perdre à jouer la rupture

Dans le cas de Microsoft, le temps joue contre eux :

– les tablettes se frayent un chemin et commencent à cannibaliser les ventes de PC.

– MS n’a pas cru aux tablettes, ou plutôt y a cru mais n’a pas su développer un nouveau paradigme (comme Apple avec iOS ou Palm en son temps), préférant simplifier l’existant (Windows CE) et a donc pris un retard effrayant.

– les services en ligne dématérialisent les logiciels, le choix d’une plateforme n’est plus le point central : on ne choisit plus Mac ou PC, mais plutôt ce qui nous parait simple à utiliser.

Donc développer deux systèmes en parallèle et devoir faire migrer (et surtout évangéliser) toute la cohorte de développeurs est trop difficile : c’est la force d’Apple qui, n’ayant que 8% du marché en informatique, s’est trouvé dans la situation confortable de gagner de nouveaux développeurs « vierges ». C’est l’inverse pour Microsoft, qui a d’ailleurs le plus grand mal a faire développer sur sa plate-forme Windows 7 Mobile.

Conclusion : regardez bien la vidéo ci-dessus à 3:05. Rien ne vous choque ? Alors que toute la presse s’extasie devant ce nouveau Windows que le marketing de MS arrive si bien à nous vendre, en fait ce nouveau Windows est identique à l’ancien. Windows 8 est une surcouche d’interface à Windows 7, qu’il remplacera certainement à terme, mais dans le fond on retrouve toujours le navigateur de fichier, le menu démarrer, la barre de tâches, et Excel absolument pas optimisé pour le tactile.

Cette interface Windows 8 est en fait comme la surcouche Média Center de Windows : elle prend le contrôle, mais en dessous les fondations restent identiques. Pour le moment.

Je crains donc que ce Windows 8 soit toujours lourd, non optimisé, trainant avec lui une bonne part de l’héritage des Windows précédent, et n’arrivant que partiellement à changer la donne surtout si Windows Mobile 7 n’arrive pas à percer plus que cela.

Dommage, car cette fois-ci MS prenait un vrai risque de différentiation.